Un accord par mail a-t-il une valeur juridique ?

Dans mon billet de la semaine dernière, je vous ai parlé de la législation concernant la signature électronique. Mais en pratique, qu’en est-il de ce procédé, qu’est-ce que réellement la signature électronique et qu’est ce qui peut être qualifié comme tel ? Votre client vous a donné son accord par mail, mais cela a-t-il une valeur juridique en tant que preuve ?

Un mail ? Une signature scannée ? Une signature graphique ? Une authentification certifiée par SMS ? Une signature par clé USB ?

Autant de procédés qui donnent du fil à retordre aux juges qui ont en leur possession des décrets et des règlements qui ne sont pas spécifiques à chacun de ces procédés. Alors comment font-ils pour donner des conclusions dans des litiges concernant des procédés liés à des signatures électroniques?

Intéressons-nous aujourd’hui, à la signature par mail.

Support papier et support manuscrit : même valeur juridique …

Si nous nous en tenons à l’article 1316-3 du Code Civil, je cite : « l’écrit sur support électronique a la même force probante que l’écrit sur support papier ». Ce qui veut dire – en théorie – que lors d’un litige, le juge peut valider le mail comme étant une preuve, comme en témoigne l’affaire suivante, jugée en 2010.

Pour résumer, un bailleur a répondu par mail à sa locataire pour lui valider la fin de son préavis le 28 août, suite au recommandé qu’elle lui a envoyé. Mais ayant perdu l’accusé de réception, cette dernière lui a renvoyé un second recommandé, reçu par le bailleur le 10 septembre. Suite à cela, le bailleur a pris en compte le congé de la locataire en date du 10 septembre alors qu’il avait répondu par voie électronique qu’il était d’accord pour dater la fin du préavis au 28 août.

La locataire a donc assigné le bailleur en justice pour faire valoir la fin du préavis à cette dernière date.

Le juge de la cour d’appel, retenant l’article précédemment cité, a donné raison à la locataire sur la base du mail de confirmation envoyé par le bailleur. Sauf que… la cour de cassation a annulé ce jugement pour non-respect total de la loi.

… jusqu’à quel point ?

Si l’article 1316-3 met sur un pied d’égalité les supports manuscrits et les supports électroniques, les articles 1316-1 et 1316-4 du Code Civil, apportent davantage de précision quant à la valeur probante de ces écrits électroniques.

En effet, si la cour de cassation a annulé et cassé la décision de la cour d’appel, c’est que le mail du bailleur, ne pouvait pas être retenu comme preuve car celui-ci ne pouvait pas être identifié comme étant le signataire de ce mail. Autrement dit, la locataire ne pouvait pas remettre en question la décision du bailleur. Le lien entre le mail et le bailleur n’était pas juridiquement prouvé et n’avait donc pas de valeur probante. La seule preuve évidente restant dans ce cas-là, le deuxième recommandé reçu par le bailleur le 10 septembre.

 

Une confirmation par mail n’est valable qu’à partir du moment où elle n’est pas contestée par l’une ou l’autre partie.

En revanche, le juge ne peut pas s’en servir de preuve lors d’un litige car aucune preuve probante ne relie le mail à son auteur, son signataire.

Lorsque vous pensez à signature électronique – et donc facilitateur de processus commerciaux ou autre – ayez à l’esprit qu’il est essentiel de pouvoir lier le signataire au document électronique afin de donner une valeur probante au document.

 

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Anne Laure Lapa:
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